La commune de Merdrignac (3100 habitants, 1682 adresses) a publié sa Base Adresse Locale en novembre 2023. Un chantier rendu possible grâce à l'aide déterminante apportée par les différents partenaires. Sylvie Ruellan, DGS, et Pauline Guillotin, responsable urbanisme, reviennent pour nous sur les étapes clés de ce travail.

Qu'est-ce qui a motivé le lancement de votre chantier d'adressage ?

En 2022, l'arrivée de la fibre a nécessité la constitution d’adresses précises. Par ailleurs, la création de plusieurs lotissements nous imposait de revoir l'adressage de la commune.

Mais ce sont surtout les différents usages, que ce soit pour les secours, les livraisons, etc... qui ont motivé le démarrage de ce chantier. À titre d’exemple, l’ALSH (Centre d’accueil de loisirs sans hébergement) inter-communal a mis plus de 6 mois pour être raccordé au téléphone. Lorsque nous avons demandé le raccordement, avec le service local cela passait, mais dès que la demande est remontée au centre régional, cela bloquait à cause de l’absence d'adresse répertoriée dans la Base Adresse nationale (BAN). Cela nous a permis de mesurer la nécessité d’avoir une base adresse locale complète pour faciliter ce genre de démarches.

Les élus ont pris la mesure de la validation des adresses comme facteur d’attractivité communal. Tous les usages quotidiens des administrés s’en trouvent facilités : livraison, secours, moyens de communication… pour des usages autant personnels que professionnels.

Comment avez-vous procédé concrètement, avez-vous eu recours à une aide extérieure ?

Nous avons d'abord été démarchés par un prestataire privé, mais leur devis nous a semblé trop élevé, d’autant qu’il nécessitait une présence d’élus et d’agents pour accompagner la démarche.  Au cours de l'été 2022, nous avons travaillé avec Axione (délégataire pour le déploiement de la fibre) sur les adresses, travail à l’issue duquel ils nous ont livré un fichier des adresses consolidé.

Nous avons la chance sur le territoire d'avoir un réseau local de secrétaires de mairie, sur l’ex-territoire de la communauté de communes Hardouinais Mené (ancienne communauté de communes fusionnée à Loudéac Communauté Bretagne Centre) . Ce réseau permet d’échanger les expériences entre communes, l'expérience d'une commune pouvant servir aux autres. Nous avons demandé à Mégalis Bretagne de nous présenter le bouquet de service et nous avons évoqué la question de l’adressage. Nous avons pu faire retour de notre expérience en la matière afin d’encourager le déploiement sur les communes du bassin de vie.

En mai 2023, Mégalis Bretagne (syndicat mixte partenaire de la Charte de la Base Adresse Locale) a animé un webinaire sur l'adressage à destination de notre réseau. Ce webinaire nous a convaincu que ce chantier était à notre portée, que nous n'avions pas besoin d'aller chercher l'expertise ailleurs. De plus, Mégalis nous a proposé son aide pour l’initialisation de la Base Adresse Locale (BAL). Cette conjonction du déploiement de la fibre, qui a permis de disposer du fichier adresse d'Axione, et l'aide de Mégalis ont été des facteurs déterminants de réussite. Sans ces partenaires, nous serions peut-être encore au point mort.

Concrètement, Mégalis a adapté le fichier fourni par Axione afin de l’intégrer au format BAL. Cela nous a énormément aidé pour démarrer. Ils ont créé la BAL début août 2023 sur Mes Adresses, nous ont transmis les droits d’accès et formés à l’outil. Puis, grâce à un renfort ponctuel de personnel durant l’été, nous avons pu compléter cette BAL : essentiellement de la certification, adresse par adresse, et du comparatif avec le cadastre pour voir si tout était correct. La plupart des corrections avaient en effet déjà été réalisées en partenariat avec Axione. Parfois il pouvait y avoir encore quelques inversions de numéros que nous avons corrigées.

La BAL a ainsi pu être publiée fin novembre, ce chantier nous a donc pris 4 mois (hors travail avec Axione en 2022) de la création à la publication, il a mobilisé une personne et quelques contractuels durant l’été.

Quelles étaient justement la nature de ces correctifs et améliorations que vous avez apportés  ?

Mégalis nous a par exemple signalé deux voies qui n’avaient pas de nom officiellement, même si elles en avaient un dans les usages quotidiens de la commune, aucune délibération officielle de nommage n'avait été prise. Axione nous a également signalé quelques numéros manquants pour lesquels nous avons dû prendre des arrêtés. Dans la grande majorité des cas, les parcelles cadastrales étaient déjà associées aux adresses car nous avions travaillé à cette association avec Axione, c’était plus pratique pour bien identifier chaque adresse.

Enfin, nous avions également deux lotissements en construction, avec pour chacun deux rues à nommer, donc on a anticipé sur les futures constructions en dénommant les voies. Nous sommes restés sur une numérotation classique (pair/impair) sur la commune, sauf pour ces nouveaux lotissements où nous sommes passés en métrique, plus adapté quand on ne connaît pas à l'avance le nombre de constructions.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?

Notre commune comporte de nombreux lieux-dits (plus d'une centaine), c’est là qu’il y a eu le plus gros travail car la plupart n’étaient même pas numérotés. Choix a été fait d'adresser directement sur ces noms de lieux-dits. Dans ces hameaux, des bâtiments ont parfois été scindés en plusieurs habitations. Par exemple, d'ancien corps de ferme réhabilités et divisés en plusieurs logements, cela a nécessité des visites sur site pour pouvoir adresser correctement.

Parfois, les difficultés étaient inhérentes à un défaut de déclaration. Par exemple, des propriétaires ont omis de déclarer la division de constructions ou de parcelles, or en l'absence de démarches, les nouvelles habitations ainsi créées n'avaient pas d'adresse.

L'adressage demande parfois aussi une petite enquête, par exemple dans le cas de bâtiments agricoles, il faut vérifier si ces bâtiments disposent d'un bureau et donc s'ils ont besoin d’une adresse pour le raccordement fibre.

Enfin, nous avons été confrontés au problème des rues, impasses et lieux-dits qui portent le même nom, cela crée un risque de confusion qu'il faut pouvoir écarter.

Comment ont réagi vos administrés vis-à-vis de ce nouvel adressage ?

La seule nouveauté c’était les numéros car nous avons conservés les noms des lieux-dits, donc peu de changements pour les administrés. Globalement, ces changements semblent très bien acceptés. La principale difficulté finalement se rencontre plus dans les usages. En effet, de nombreux administrés se trompent encore sur leur numéro malgré la communication qui a été faite à chacun pour les informer de leur adresse exacte. Parfois même, ils vont mal rédiger le nom de leur voie. Ils ont donc parfois encore du mal à s’emparer de leur nouvelle adresse. Dans le processus d’adressage, la commune reste l’interlocuteur de proximité privilégié. Il faut l’afficher, communiquer,  pour que les administrés puissent déclarer les bonnes données.

Avez-vous mesuré des bénéfices suite à la publication de votre base adresse locale dans la base nationale ? Comment allez-vous gérer les mises à jour ?

Nous n'avons pas de plaintes au niveau de l'arrivée des secours ou des livraisons, il nous est donc difficile de mesurer les bénéfices sur ce point, mais on peut penser que s'il n'y a pas de retours, c'est que l'adressage ne pose pas de soucis particuliers. En revanche, notre adressage a considérablement simplifié le travail des agents lors du recensement communal qui ont pu vérifier les adresses sur la BAL.

Par ailleurs, les choses sont désormais beaucoup plus claires au niveau de l’urbanisme, nous pouvons plus facilement, et plus rapidement, fournir les informations d’adresses et de cadastre.

Nous mettons à jour les adresses au fil de l’eau, presque chaque mois, cette opération est confiée à la responsable de l’urbanisme, ce qui est pertinent car elle est la mieux placée pour anticiper sur les futures constructions. Cela permet aussi d’anticiper d’éventuels problèmes sur le plan d'urbanisme.

En conclusion, la BAL est une référence sûre, partagée, au service des administrés et également des services municipaux. Sa pertinence est confortée par de multiples usages et sa pérennité est assurée par le service de proximité que constitue la Mairie (service urbanisme), avec une mention particulière à Mégalis Bretagne pour son accompagnement.

Propos recueillis le 16 mai 2024 par Olivier Bourreau