Deux ans après un premier témoignage¹, retour à Azay-sur-Cher avec Jean-Pierre Martineau, adjoint en charge des bâtiments, du cadre de vie et de la sécurité civile. Parce que l’adresse est une donnée vivante, il raconte comment la commune fait vivre son adressage riche de 146 voies, 46 lieux-dits et 1 593 numéros pour 3 100 habitants. Un modèle de suivi malgré le passage de témoin entre élus et de partage des informations avec les agents, les habitants et les utilisateurs.  

Votre commune a réalisé une très belle Base Adresse Locale et la maintient très sérieusement. Pouvez-vous revenir sur ce projet ?  

Jean-Pierre Martineau : Notre objectif était de repérer toutes les rues, les lieux-dits, les numéros. C'était une volonté très forte de notre maire et de notre conseil municipal. Depuis 2014, notre maire avait le souhait de renseigner correctement tous les numéros de toutes les rues, notamment pour anticiper sur les besoins futurs de connexion à la fibre. Nous avions ce problème commun aux petits villages très étendus par rapport à la population, et qui comptent de nombreux hameaux. Autrefois, l’adressage était formulé de la sorte « j’habite Les Plateaux » et le facteur devait se débrouiller pour trouver la boîte aux lettres. Puis l’adressage s’est structuré, avec même l’apparition de numéros métriques que nous ne connaissions pas auparavant. Notre commune est traversée par des routes départementales et ce type de numérotage était le plus simple. Nous avons conservé la numérotation séquentielle dans le centre du bourg. Mais dans les écarts, nous constatons une vraie amélioration lorsqu’il n’existe que trois maisons sur une départementales. Les numéros métriques facilitent l’accès des secours et de tous les autres services.Claude Ablitzer, mon prédécesseur, a réalisé 99 % de la Base Adresse Locale sur l’éditeur Mes Adresses. Depuis son départ, je me charge de la modification et des mises à jour lors des dépôts de nouveaux permis de construire en m'appuyant fortement sur son travail.

La commune a très bien saisi le sujet de l’adressage, y compris sur l’aspect des mises à jour et du maintien de la Base Adresse Locale.

Jean-Pierre Martineau : Claude Ablitzer, très pragmatique et méticuleux, avait compris l’intérêt de la Base Adresse Locale. Le transfert des fonctions s’est déroulé sans aucune difficulté. Il m’a tout expliqué et m’a donné l’envie de faire vivre cette base.

Et quels étaient ses arguments ?

Jean-Pierre Martineau : Une structuration très précise de toute la voirie communale, la délivrance du courrier qui est importante. Lorsque le facteur ne trouvait pas le destinataire, il venait à la mairie et le personnel administratif devait le guider. Nous perdions du temps, nous comme lui. Et comme je vous l’ai dit, l’adresse est très importante pour les secours, même si nos pompiers locaux connaissent bien la commune. Lorsqu’un SDIS d’une ville voisine se déplace, il ne connaît pas forcément les hameaux, les rues, etc. et s’aider de la Base Adresse Nationale améliore la durée d'intervention. Par ailleurs, un adressage précis est sollicité pour la connexion à la fibre.Pendant longtemps, lorsque nous demandions leur adresse à des habitants, certains répondaient « je me trouve au bout de la rue, à côté de la borne incendie ». Désormais, ils sont plus précis et répondent « j'habite au numéro 5 de la Rue... », ce qui facilite le travail de tous.Et les adresses remontent dans les GPS, même s’il faut un peu de temps.

Avez-vous observé des délais de mises à jour des GPS ? Vous avez effectué les signalements vous mêmes ?

Jean-Pierre Martineau : TOM TOM met à jour sa base très rapidement, Google Maps beaucoup moins. J’ai réussi à procéder aux mises à jour dans Waze également. Je ne suis toutefois pas certain d’avoir effectué tous les signalements aux opérateurs de GPS.

Autre motivation, Claude Ablitzer avait passé du temps sur cette base d’adresses. Il aurait été vraiment dommage de ne pas faire vivre un tel travail.

Effectivement, il avait recensé tous les lieux-dits et hameaux, anticipant la loi 3DS

Jean-Pierre Martineau : Son objectif principal était de faciliter le déploiement de la fibre optique. Mais la base n’a pas toujours été utilisée par le prestataire de déploiement.

Vous avez donc croisé le fichier de votre Base Adresse Locale avec les adresses utilisées par l’opérateur ?

Jean-Pierre Martineau : C'est cela. L'opérateur met à disposition une carte d'éligibilité à la fibre. J’ai extrait le fichier .csv de ma base et l’ai comparé visuellement avec les adresses du déploiement car je n’ai pas pu récupérer de fichier sur le site de l’opérateur. J’ai répertorié toutes les adresses de la Base Adresse Locale qui n’étaient pas reprises et lui ai envoyé le fichier recensant les écarts en expliquant comment j’avais procédé pour comparer les adresses. Pour le moment les problèmes d’adressage perdurent, avec quelques corrections. Le déploiement a avancé pour atteindre 60 % du territoire. D’ailleurs, les erreurs qui persistent s’expliquent car l’opérateur a dû lancer ses études en 2018-2019 alors que notre adressage est bien plus récent et que des permis de construire ont été attribués depuis cette date. Les difficultés concernent à la fois les nouvelles habitations mais aussi des maisons qui étaient équipées en filaire par Orange auparavant. Une même adresse est attribuée à deux demeures différentes.

Vous avez également réalisé un document d’information sur l‘adresse à destination des agents de la mairie

Jean-Pierre Martineau : C’est un petit schéma de l’adresse pour que les agents puissent naviguer sur le site de la Base Adresse Nationale, car je trouve que l’adresse est simple d’utilisation.

C’est une excellente idée pour que les autres agents de la communes se réfèrent aux bonnes adresses.

Jean-Pierre Martineau : Je travaille un peu sur l’urbanisme avec un agent chargé de ce sujet et des comparaisons sont faites entre le cadastre et la Base Adresse Nationale.

Effectivement, le cadastre est mis à jour tous les trois mois dans la BAN. Pour le moment, la mise à jour du cadastre avec les éléments de la BAN n’est pas encore automatique. Il faut encore faire parvenir l’information directement à la DDFiP.

Jean-Pierre Martineau : J’ai échangé récemment avec le cadastre : il n’y avait aucun problème d’utilisation des adresses. J’ai trouvé très peu d’écart entre notre Base Adresse Locale et la numérotation du cadastre. D’autres agents ont besoin de se référer à la Base Adresse Nationale, comme les policiers municipaux par exemple.

Et vous avez aussi communiqué dans le bulletin municipal auprès des habitants.

Jean-Pierre Martineau : Il y a toujours quelques réticences et il est important de trouver des arguments pour expliquer que les changements d’adresses que nous avons réalisés ont été nécessaires pour améliorer l’accès des services, des secours, etc. Si les secours mettent 5 mn au lieu de 30 mn pour trouver un habitant, cela fait une différence essentielle ! J’ai récemment demandé un re-numérotage de rue pour arrêter de démultiplier les suffixes alors que des parcelles pouvaient être constructibles. Comme cette rue était privée, nous avons sollicité les propriétaires car nous préférons obtenir leur accord.

Vous allez délibérer sur les chemins ruraux également ?

Jean-Pierre Martineau : Nous délibérons lorsque nous modifions le statut des chemins ruraux. En ce qui nous concerne, toutes les habitations légales ont une adresse dans notre BAL et certaines portions de chemins ruraux sont dénommées en « allée », « rue » ou « chemin ». Nous avons perdu très peu de chemins ruraux. La SAFER avait réalisé une enquête en 2011 pour tous les recenser, y compris les chemins d’exploitation. La perte a concerné les chemins d’exploitation parce que certains sont désormais cultivés. Je pense qu’ils sont toujours connus du cadastre. Nous souhaitons encourager la circulation la plus douce possible, piétonne ou cycliste. Des chemins carrossables y sont destinés et nous souhaitons les repérer en « allée » ou « chemin », même s’il n’y pas d’adresse. Nous allons les renseigner dans la liste des « toponymes » sur l’éditeur Mes Adresses.

Pour qu’ils puissent être référencés sur les itinéraires touristiques, de vélo, etc. il serait intéressant de les signaler à OpenStreetMap et à l’IGN.

Jean-Pierre Martineau : Justement notre communauté de communes a mis en place un plan vélo, avec des cartes très détaillées sur OpenStreetMap où nous retrouvons les pistes cyclables et d’autres renseignements utiles autour du vélo. La possibilité nous est donnée pour faire vivre ces cartes, ce que j’ai fait récemment pour la commune.  

Vous vous coordonnez à l’échelon de la communauté de communes sur l'adressage ?

Jean-Pierre Martineau : Non, il n’y a pas de coordination. Il faudrait peut-être en discuter en commission. La Communauté de communes Touraine-Est Vallées compte 10 communes, certaines ont renseigné leur Base Adresse Locale.

Effectivement, les communes sont au plus près du terrain pour réaliser l’adressage. La délégation fait souvent perdre du temps, avec parfois des outils très compliqués simplement pour ajouter des points adresse et des noms de voies et lieux-dits. Actuellement, vos adresses sont certifiées et vous maîtrisez tout le circuit.

Jean-Pierre Martineau : Votre outil est très simple à utiliser et très ergonomique. Vous fournissez de la documentation, mieux que quelques chapitres, et je trouve les explications très claires. C’est un outil facile.

Mes Adresses a été pensé par l’élu d’une toute petite commune, sur le terrain. Souhaiteriez-vous des améliorations ?

Jean-Pierre Martineau : Non, il est très bien comme cela. Trop demander à un outil revient à compliquer l’utilisation - à part si les objectifs changent. Il faudrait peut-être ajouter une couche pour les déclarations.Par exemple, nous rencontrons un problème pour gérer les concessions du cimetière, entre celles qui sont encore payées, celles qui ne le sont pas, etc. Ce serait une bonne idée de proposer un adressage des cimetières. Certains sont très bien structurés, avec des allées qui portent des noms. On s’y repère très facilement.Mais pour en revenir à votre outil, s’il respecte la loi 3DS, il n’y a pas lieu de le compliquer. En conclusion, je dirais que c’est un outil très simple à utiliser qui apporte énormément de fonctionnalités pour différents services de l’État. Et dernière question, avez-vous des indicateurs sur le nombre de communes qui ont certifié leurs adresses ? Il est intéressant de suivre l’avancée de l’adressage.

Propos recueillis le 24 février 2023 par Sophie Clairet

1« Azay-sur-Cher : des adresses détaillées hameau par hameau et rue par rue », témoignage publié le 19 août 2021. https://adresse.data.gouv.fr/bases-locales/temoignages/azay-sur-cher-des-adresses-d-c3-a9taill-c3-a9es-hameau-par-hameau-et-rue-par-rue